Apocalypse et philosophie
Du cataclysme à la promesse
L’apocalypse philosophique existe-t-elle encore aujourd’hui ? Depuis le millénarisme médiéval de Joachim de Flore jusqu’aux annonces de Peter Sloterdijk, le discours du cataclysme n’a cessé de se renouveler et il reproduit en le modifiant un dispositif maintenant bien connu : un renversement du temps de l’histoire, en continuité avec l’approche par les catégories, déjà classiques depuis Hegel, d’une structure nécessaire, d’une téléologie. La plupart des philosophies de l’histoire, pensons seulement à Auguste Comte, considèrent le progrès comme le moteur d’une histoire orientée nécessairement vers le bien. Le catastrophisme contemporain, autant scientifique que philosophique, propose de renverser cette structure : s’instaurant prophète d’une fin néfaste, fondée sur la ruine écologique et sur la terreur généralisée, il prophétise un désastre inéluctable, et pour certains déjà manifeste. Du stalinisme aux manipulations génétiques rendant possible la gestion de l’espèce humaine, Peter Sloterdijk, pour ne nommer que lui, appartient à cette catégorie de prophètes du mal nécessaire.