Gnawa diffusion
Entre le soleil de France et de Bab El Oued
Une entrevue avec Amazigh Kateb
L’art n’est pas un antre où pourraient se réfugier intégristes de tout poil ou amuseurs publics. Il s’agit plutôt d’une navigation, d’un entre-deux où circulent et dialoguent de multiples points d’ancrage. Navigation à haut risque comme celle d’Ulysse mais, malgré ses périls, elle seule peut arracher un peu de sens à ce qui ne serait qu’une « histoire dite par un idiot, pleine de fracas et de furie, et qui ne signifie rien ».
L’artiste, donc, comme passeur de signes et de symboles. Rebelle aussi. Rebelle à tout ce qui emprisonne et mutile la vie. Alors qu’un nouveau cycle de luttes contre la mondialisation capitaliste semble s’être enclenché, de nombreux artistes ont repris le flambeau du refus. Qu’on songe, pour la France, au Massilia sound system, aux Fabulous troubadours, à Zebda et, enfin, à Gnawa diffusion. Fondé en 1992 à Grenoble par Amazigh Kateb, ce groupe distille une musique proprement universelle avec de profondes racines africaines et algériennes. Issue de la tradition gnawa, celle des chants des esclaves africains, cette musique fusionne les instruments traditionnels avec l’électricité. Propulsées par cet environnement sonore, les paroles des chansons de Gnawa diffusion sont comme de véritables missiles dirigés contre les crimes et les injustices perpétrés par les dominants à l’encontre de l’ensemble de la planète.
Entre le soleil de France, de Kingston et de Bab El Oued, Gnawa diffusion et Amazigh Kateb arpentent ainsi l’espace d’une liberté à créer, par-delà les frontières de styles ou de territoires. Une entrevue, donc, avec un homme libre [1].