Bien aller

No 086 - décembre 2020

Éditorial du numéro 86

Bien aller

Le Collectif de la revue À bâbord !

L’année 2020 restera malheureusement dans nos mémoires comme une année d’une grande violence. Toutes et tous, autant que nous sommes, avons vu nos vies profondément chamboulées par la pandémie. Au milieu de cette déferlante d’inattendus, d’injustices et d’angoisses, une question nous est venue à l’esprit : « Comment allons-nous ? ». Comment allez-vous, vous qui lisez ces quelques lignes de notre collectif dont les rencontres de préparation sont devenues virtuelles ? Comment vont vos proches, vos communautés ? Comment se portent vos ancrages ? Les fermetures de nos lieux de socialisation et de rencontres, les pertes d’emploi, la reconfiguration de nos relations personnelles et de travail ont bouleversé nos milieux et nos liens. Prendre soin de nos proches en les maintenant à distance est un paradoxe exigeant. Tout cela a des effets indéniables sur notre santé mentale, notamment chez les plus jeunes et les plus âgé·e·s d’entre nous. Plus le temps passe et plus le slogan « ça va bien aller » semble dérisoire, voire même ironique.

Bien aller, c’est pourtant la direction vers laquelle nous souhaitons nous diriger. Les violences de 2020 apparaissent toutefois comme autant d’embûches sur nos chemins. De la mort de George Floyd à celle de Joyce Echaquan, de l’extrême droite de Trump à celle des complotistes de toute espèce, les violences policières, raciales, sexuelles et politiques ont marqué les derniers mois. Elles nous ont également marqué·e·s dans notre capacité à absorber individuellement et collectivement les événements comme autant d’ondes de choc. Tout cela, alors que les crises sanitaire, sociale et environnementale se nourrissent les unes les autres, avec des conséquences graves ici, et souvent catastrophiques ailleurs.

S’il faut pourtant bien poursuivre notre chemin, il faut peut-être en redéfinir l’horizon. D’ailleurs, nos camarades d’autres médias indépendants nous ont déjà invités à cet exercice, en s’interrogeant sur « La disparition du ciel » (Liberté) et en annonçant « La fin d’un monde » (Nouveau Projet). De fait, il apparaît nécessaire de faire des deuils tout en définissant d’autres fins porteuses d’espoirs. Dans cette lignée, et parce qu’il faut justement se serrer les coudes (à défaut de se tendre la main !), nous vous invitons à oser rêver malgré tout ! N’est-ce pas là le point de départ de toutes transformations telles que nous les envisageons ? Rêver, c’est se permettre de penser le réel différemment, d’envisager une société sans violences, des relations humaines sous la gouverne de la bienveillance et un rapport au vivant transformé.

Le dossier de ce numéro tombe à point même s’il était prévu avant même le début de la pandémie. En effet, la résilience est un moyen de se sortir la tête de l’eau, ou, mieux encore, de se réapproprier notre existence. Bien sûr il y a des débats sur sa définition et son utilité, et nous ne manquons pas de les aborder dans ce dossier, mais la résilience, comme capacité d’affronter un stress ou de faire face à un choc, nous apparaît justement porteuse d’espoir. D’ailleurs, n’est-ce pas l’objectif des forces de gauche de mettre en place des structures collectives permettant d’assurer le bien-être de chacun·e, notamment en période de crises ? Plutôt qu’un éventuel retour à « l’anormale », notre résilience individuelle et collective doit plutôt nous amener à prendre soin de nous, des autres et de notre environnement afin de le mettre au service d’une transformation radicale de la société, pour que l’on puisse un jour « bien aller ». Alors, on s’y met ?

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