Mini-dossier : COVID en continu
Apprendre derrière son écran. Entretien avec la FECQ
Propos recueillis par Valérie Beauchamp
La rentrée au cégep a été difficile pour les étudiant·e·s. Dans le contexte de l’enseignement à distance, la perte d’un espace de socialisation, ainsi que les défis liés à l’organisation du travail et à la motivation scolaire pèsent lourd sur leurs épaules, selon la Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ).
Pour les étudiant·e·s, ce sont les cours dispensés à distance qui posent le plus de difficulté. Ils et elles auraient eu besoin de formation pour utiliser les technologies dans ce contexte particulier d’apprentissage. Dès le printemps, la FECQ a d’ailleurs adressé au gouvernement des demandes pour une formation sur les techno-pédagogies. « On s’attendait que ça soit disponible à la rentrée, mais on apprend que c’est en construction. On est quand même rendu au mois d’octobre et il n’y a rien de disponible pour les étudiants. Donc c’est eux-mêmes, avec les ressources que donnent les établissements, qui doivent apprendre à utiliser ces outils technologiques et à se créer un environnement d’apprentissage qui est propice à la maison. » Plusieurs se voient donc confronté·e·s au défi de s’adapter à des outils d’apprentissage en même temps qu’ils et elles doivent acquérir de nouvelles connaissances.
Perte de repères
À cela s’ajoute la lourdeur de la perte d’une relation pédagogique significative entre l’enseignant·e et les étudiant·e·s. Le défi de l’organisation de leur temps et de leurs travaux ressort fortement chez les étudiant·e·s qui ne peuvent pas compter sur un encadrement optimal de leurs professeur·e·s. Pour la FECQ, le corps enseignant ne possède pas les ressources nécessaires pour assurer un accompagnement adéquat dans le contexte pandémique actuel.
De plus, la capacité des étudiant·e·s de se créer un environnement de travail propice à l’apprentissage est grandement détermin é e par leurs conditions socioéconomiques. En situation de colocation, plusieurs se voient obligé·e·s de s’installer dans leur chambre pour suivre leurs cours en ligne. Certain·e·s ne possèdent pas l’espace nécessaire pour y installer un bureau, et leur lit devient donc leur espace de travail. Cette réalité se voit aussi chez ceux et celles dont le domicile familial ne permet pas de concilier le télétravail des parents avec les cours à distance des enfants. Pour la FECQ, cela nuit grandement à l’engagement dans la démarche pédagogique. « La ligne entre la vie privée et l’école s’amenuise. Ce ne sont pas de saines habitudes de vie de dormir et de suivre ses cours dans le même endroit, et ça joue beaucoup sur la motivation dans les études et sur la santé mentale des étudiants en général. »
La FECQ entrevoit la possibilité d’une vague de décrochage massive si rien n’est fait pour alléger les difficultés des étudiant·e·s qui payent de leur santé mentale l’absence de mesures substantielles pour les soutenir. Démotivé·e·s, avec le sentiment d’être laissé·e·s à eux-mêmes et elles-mêmes, sans possibilité de socialiser pour se soutenir, en pleine adaptation à une nouvelle façon d’apprendre, bien souvent dans des environnements qui ne sont pas propices au travail intellectuel : tout cela crée un climat de détresse psychologique généralisée dans la population étudiante.
Pour les suites
En vue d’une session d’hiver dispensée à grande majorité en ligne, une des demandes de la FECQ concerne la disponibilité et l’accessibilité d’une aide psychosociale pour les étudiant·e·s .
La FECQ demande aussi au gouvernement d’augmenter les prêts de matériel informatique pour que chacun·e dispose des outils nécessaires à son apprentissage. De plus, même avec une fermeture des établissements scolaires, les cégeps devraient être en mesure de continuer à offrir des locaux pour les étudiant·e·s qui n’ont pas à leur domicile la possibilité de se créer un environnement de travail décent, ou n’ont pas accès à une bande passante adéquate pour l’utilisation des plates-formes d’enseignement en ligne.
Finalement, la FECQ demande d’être impliquée dans les décisions qui seront prises concernant les prochaines sessions, car il est primordial de ne pas négliger la voix des étudiant·e·s dans l’élaboration de mesures qui les concernent en premier lieu.