Martine Delvaux
Je n’en ai jamais parlé à personne
Martine Delvaux, Je n’en ai jamais parlé à personne, Héliotrope, 2020, 123 pages.
En octobre 2017, en plein cœur du mouvement #moiaussi, Martine Delvaux recueille cent messages de femmes qui racontent, témoignent, expriment, décrivent leurs expériences de violence.
En 2020, l’autrice, essayiste et romancière féministe agence ces témoignages. Ceux-ci sont découpés en parties, puis assemblés de manière éparse. Ainsi, les catégories émergent à travers la lecture : quand, quoi, comment, pourquoi, par qui, dans quel contexte, sans l’avoir avoué à personne. Le style littéraire est efficace et ingénieux.
Les récurrences sont frappantes. Martine Delvaux a voulu « que le découpage, le travail du fragment, le collage, le montage parviennent à éclairer une totalité de l’expérience en même temps que, chaque fois, son extrême spécificité ». Force est de constater que l’opération est réussie.
Les apports anthropologiques et sociologiques de l’ouvrage sont manifestes. Cette possibilité qui nous est donnée d’observer les récits de cent femmes est un travail de terrain. Un travail qui vise à documenter scientifiquement un phénomène social. Un travail qui va rester.
Je n’en ai jamais parlé à personne, c’est une manière de laisser des traces de cette violence quotidienne, de ces agressions sexuelles que subissent les femmes, incluant les témoignages de trois femmes que je connais personnellement. C’est grâce à leur courage que l’ouvrage a pu exister. Elles ont fait front commun.