International
L’extrême droite bien vivante en Italie
Si l’extrême droite inquiète en France, elle semble tout aussi menaçante en Italie. Quand on fait la somme des appuis aux partis de cette tendance, on se retrouve avec 40 % des intentions de vote, un chiffre par ailleurs plutôt stable depuis les dernières élections.
L’extrême droite en Italie a principalement été incarnée ces dernières années par La Lega, parti dirigé par Matteo Salvini. Se déclarant antisystème, critique de la corruption et de l’Union européenne, le parti s’est surtout fait connaître pour sa volonté de se séparer du Sud de l’Italie, considéré comme un obstacle à la prospérité du Nord. Sa position clairement anti-immigration est cependant devenue la marque principale de La Lega.
Ce parti se fait présentement dépasser sur sa droite par un autre encore plus conservateur : Fratelli d’Italia, dirigé par Georgia Meloni, une charismatique cheffe, ex-ministre dans le gouvernement de Berlusconi, et qui défend les idées les plus réactionnaires. Ce parti est par ailleurs l’héritier du néofasciste Movimento sociale italiano, créé aux lendemains de la Seconde Guerre mondiale.
Avec Georgia Meloni au pouvoir, les reculs sur le plan social et économique seraient significatifs. Les droits de femmes et des personnes LGBTQ+ ainsi que les politiques d’immigration subiraient de durs contrecoups, alors que seraient promues les valeurs les plus traditionnelles concernant la famille et le travail. Fratelli d’Italia défend par ailleurs l’économie de marché et l’austérité budgétaire.
Geogia Meloni obtient quelques avantages sur son rival Salvini. Comme son parti ne s’est jamais compromis à gouverner, contrairement à la Lega, elle profite de l’engouement des Italien·nes pour les partis « antisystème ». Elle prétend aussi pouvoir représenter l’ensemble des Italien·nes, et non pas seulement les privilégié·es du Nord. Très présente dans les médias, elle a l’art d’éviter les questions de fond et se montre à la fois mordante et rassurante.
L’ironie de la politique italienne fait que La Lega et Fratelli d’Italia se trouvent dans une coalition dite de centre droit avec Forza d’Italia, le parti de Silvio Berlusconi. Les idées d’extrême droite se trouvent ainsi normalisées, ramenées dans une zone plus respectable, tout en ne perdant rien de leur radicalité. Un phénomène qui n’est pas sans surprendre ni inquiéter.
Certain·es observateur·trices se rassurent cependant en constatant que la présence de deux partis d’extrême droite, presque à égalité dans les sondages, aura comme conséquence de diviser le vote et de les affaiblir. Les bonnes performances du Partito Democratico (centre gauche), légèrement en tête dans les intentions de vote, rendent une victoire de ces partis moins probable.
Il n’en reste pas moins que la menace pour la démocratie est bien réelle. Le soutien significatif d’une bonne partie de la population à des partis aussi clairement à droite — en Italie et ailleurs en Europe —, causé en partie par les désillusions et la colère provoquées par de longues années de politiques néolibérales, est un défi considérable pour la gauche. La route sera longue avant de ramener une grande partie de ces électeurs·trices vers une vision plus solidaire et moins individualiste des rapports sociaux.