La fabrique du viol

No 082 - janvier 2020

Suzanne Zaccour

La fabrique du viol

Miriam Hatabi

Suzanne Zaccour, La fabrique du viol, Montréal, Leméac, 2019, 168 p.

Dans le sillage des mouvements #AgressionNonDénoncée et #MoiAussi, la juriste, autrice, activiste et candidate au doctorat en droit à l’Université d’Oxford Suzanne Zaccour use d’un langage franc et sans compromis pour déconstruire la culture du viol, qu’elle définit comme « toutes ces pratiques, mythes, conventions et faits culturels qui banalisent, dénaturent ou favorisent les violences sexuelles dans notre société, [qui existent dans] les arts, le droit, la politique [et qui se manifestent par] le blâme des victimes et la socialisation genrée ». Ce plaidoyer pour une restitution de la crédibilité des victimes d’agressions sexuelles est composé d’une série de courts chapitres sous trois thèmes : les victimes, les violeurs et le consentement.

L’ouvrage de Zaccour présente de manière incisive les mécanismes qui privent les victimes de leur crédibilité, qui entretiennent le doute quant à leur témoignage et qui les poussent à employer des stratégies pour se protéger. Il met aussi au jour les différents leviers dont bénéficient les agresseurs pour ne pas être punis, comme se faire victime d’un complot d’une ex « criss-de-folle » ou profiter des doubles standards quant à la présomption d’innocence dans l’espace public. À la source de ces problèmes se trouve celui entourant le consentement : s’il n’est pas ignoré d’emblée, un « non » ou toute autre expression de désintérêt ou de refus peut être le déclencheur de négociations ou de manipulations bien connues de toutes. En ce sens, Zaccour montre clairement comment la culture du viol prend aussi forme dans les situations les plus « ordinaires ».

Ponctué de rubriques informatives ou interactives, ce livre incite les lectrices et les lecteurs à amorcer une réflexion et une introspection sur leurs comportements et leurs biais en la matière. Comme Zaccour le dit si bien, les conversations qu’invite cet ouvrage sont parfois inconfortables, « mais le confort n’est pas ce dont notre société a besoin pour déraciner le viol ».

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