Dossier : Gaspésie - Forces vives

Inclusion sociale

Un grand défi pour les anglophones

Dossier : Gaspésie - Forces vives

Cynthia Dow

Le comité d’action sociale anglophone (CASA) aide les jeunes anglophones de la péninsule gaspésienne grâce à son programme Compass. Ce programme vise à aider les anglophones de 12 à 35 ans pour qui accéder au marché du travail présente toutes sortes de difficultés.

« Allez-y, essayez. On ne sait pas le résultat avant d’essayer. » C’est ainsi que Rhonda Kruse s’est convaincue de prendre un emploi au supermarché de Paspébiac où la seule langue de travail est le français. « On a l’impression que notre français n’est pas assez bon. Nous croyons que nous n’aurons jamais la chance de trouver un emploi  », explique Rhonda. La coordonnatrice de Compass, Roberta Billingsley, le confirme : « Le niveau de confiance des gens que l’on dessert est effectivement très bas.  »

Dans la région de la Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine, il y avait 9 405 anglophones (c’est-à-dire ayant l’anglais comme première langue officielle parlée) selon le recensement de 2011, représentant 10,2 % de la population totale. Éparpillés dans les villages du côté sud, leur connaissance du français et la confiance de participer pleinement dans l’économie de la région ne sont pas assurées.

Ils font face à beaucoup de barrières à l’inclusion sociale : ils sont 6 % plus susceptibles d’être sous le seuil de la pauvreté que les francophones. Les enfants sont les deuxièmes plus pauvres de la province et sont, proportionnellement, deux foisplus nombreux à être dans des familles monoparentales que les enfants francophones de la région.

Autre facteur troublant : de tous les anglophones et francophones de la province, les anglophones de la Gaspésie et des Îles sont les moins scolarisés : 73,6 % ont un diplôme d’études secondaires ou moins. Leur taux de chômage est le plus élevé de la province à 26,5 % parmi les gens âgés de 15 ans et plus. Le taux est encore plus alarmant dans la population de 15 à 29 ans, avec 34,4 %, deux fois celui de la population francophone de la région (15,3 %). Même sur la Basse-Côte-Nord, le taux de chômage est moins élevé chez les anglophones.

La moitié des anglophones gaspésiens entre 15 et 29 ans sont hors du marché du travail, ne cherchant plus d’emploi. Et la majorité d’entre eux (77,3 %) vit sous le seuil de la pauvreté.

Le CASA, avec plusieurs partenaires de la région, a créé le programme Compass pour essayer d’encourager les jeunes de la communauté et les convaincre de prendre leur place. Le programme a trouvé un auditoire très intéressé : « Notre cible était de travailler directement avec 200 personnes  », note Mme Billingsley. « On a eu contact avec plus de 2 000 jeunes. Tout le monde veut un job. »

Elle explique que les partenaires comme la défunte Conférence régionale des élus (CRÉ) et Emploi-Québec ont vite compris que travailler de façon efficace avec les anglophones n’est pas une simple question de traduction ou d’interprétation : « Il faut adapter des programmes et des services aux besoins spécifiques de cette population.  »

Malheureusement, le programme Compass a été victime des coupes récentes du gouvernement québécois. Avec la disparition de la CRÉ et d’autres partenaires financiers, CASA doit recommencer la longue démarche de rétablir des partenariats et se trouver du financement.

Néanmoins, Rhonda Kruse et son époux sont la preuve de l’importance d’un tel programme : ils sont sortis de l’aide sociale. « Compass a changé nos vies », dit Rhonda, expliquant qu’elle connaît maintenant « tous les mots nécessaires en français  » pour faire son job, et elle reçoit aussi beaucoup de requêtes afin d’aider les clients anglophones à l’épicerie.

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