Éric Bédard
Les Réformistes, une génération canadienne française au milieu du XIXè siècle
Éric Bédard, Les Réformistes, une génération canadienne française au milieu du X1Xe siècle, Montréal, Boréal, 2009.
Récipiendaire du prix Clio-Québec 2010 de la Société historique du Canada, le dernier ouvrage de l’historien Éric Bédard s’intéresse à une génération de politiciens québécois qui, à la suite de l’échec des rébellions de 1837 et 1838, s’applique à mettre en place un « plan B » pour les Canadiens français, la survivance. L’auteur les appelle les Réformistes.
Ce sont en effet les Lafontaine, Parent, Chauveau, Cartier, Morin, etc., qui vont se désintéresser des idées libérales et de tout projet indépendantiste pour ancrer l’avenir du Québec dans le conservatisme politique et le fédéralisme canadien. Ainsi, croient-ils, les Canadiens français résisteront à l’assimilation. Ces penseurs et politiciens, les « bleus », ont certainement laissé leur marque dans l’histoire du Québec et l’ouvrage de Bédard tire son originalité du fait que peu de recherche est consacrée actuellement à ces personnages.
D’ailleurs, Bédard s’en désole et attribue cet état de fait à la trop longue domination de l’histoire sociale dans les départements d’histoire des universités québécoises. Dans une longue introduction, il crache son venin sur cette méthode historique qui, selon lui, fait en sorte que « notre mémoire collective ne rend pas compte des profondes mutations qui ont marqué le milieu du XIXe siècle. »
Sur le fond, l’ouvrage de Bédard a le mérite d’éviter d’être une simple compilation de biographies. L’auteur réussit habilement à présenter un groupe de politiciens et leurs idées sur l’économie, la religion, la démocratie, l’américanité, etc. De la sorte, Bédard esquive en bonne partie de potentielles critiques de l’histoire politique voulant que celle-ci se concentre seulement sur les chefs d’État, les rois, les grands industriels.
De manière plus générale, il faut lire cet ouvrage à la lumière de la volonté de plusieurs intellectuels proche du PQ d’ancrer le nationalisme québécois dans un nationalisme ethnique plutôt que civique. Selon cette approche « identitaire », il faut réhabiliter les grands personnages du passé qui auraient déterminé notre identité actuelle. À quand un ouvrage de réhabilitation de Duplessis ?