François Saillant
Brève histoire de la gauche politique au Québec
François Saillant, Brève histoire de la gauche politique au Québec, Montréal, Écosociété, 2020, 272 pages.
Nous connaissons bien François Saillant, le militant inlassable qui a si habilement raconté son parcours dans Le radical de velours (M Éditeur, 2012). Avec sa Brève histoire de la gauche politique au Québec, il nous fait aussi découvrir son talent d’historien.
Cet essai réunit toutes les qualités d’un ouvrage écrit par un chercheur compétent. L’objet d’étude est clairement déterminé, soit l’histoire des partis politiques de la gauche depuis le XIXe siècle, et cela uniquement. La recherche s’appuie sur une importante documentation et sur des sources multiples, exploitées de façon rigoureuse. L’auteur parvient adroitement à suivre le parcours tumultueux de la gauche politique québécoise, non sans mérite, puisque les querelles internes dans les différents groupes et les nombreuses divisions entre des individus partageant souvent des objectifs similaires ne rendent pas la tâche facile aux observateurs.
Selon Saillant, le succès de Québec solidaire, le seul parti très à gauche ayant réussi à faire élire plusieurs députés (si on exclut le Parti québécois, qui n’entre pas dans son cadre d’analyse), est directement lié à sa capacité d’avoir enfin rassemblé un prisme très large de militant·e·s de la gauche. L’étape suivante, soit la prise du pouvoir, semble encore bien éloignée, cependant.
Saillant montre très bien le courage et la force de conviction de tant de personnes qui se sont battues dans tant de partis ne récoltant qu’un mince pourcentage du vote, et qui ne se sont pas laissé abattre pour autant. Notre système politique, et les médias qui en sont les haut-parleurs, ont toujours été très durs pour celle et ceux qui défendent des idées qualifiées de radicales. Ce qui a contraint cette gauche à agir comme Sisyphe, à toujours tenter de remonter la pierre en haut de la montagne, jusqu’à ce qu’elle retombe.
Plus l’histoire de la gauche se rapproche de là où nous en sommes, plus la tâche d’historien devient difficile pour l’auteur. D’abord parce que celles et ceux qui y ont participé l’ont clairement en mémoire et qu’il faut beaucoup de doigté pour bien raconter les événements sans risquer de déplaire. Mais surtout parce que l’auteur est un des personnages du récit qu’il raconte. Pour conserver une certaine neutralité dans la narration, Saillant parle de lui-même à la troisième personne et ce, avec une grande sobriété. Un choix qui se justifie bien à mon avis, qui permet de ne pas créer de rupture de ton entre le récit des événements anciens et rapprochés.
Le livre de Saillant est un bel hommage à ces nombreux Don Quichotte qui se sont battus et se battent encore pour de très nobles idéaux dans un contexte peu favorable. Sans les idéaliser, sans en ignorer les faiblesses, il montre que malgré leurs échecs politiques, leurs idées continuent à avancer. Ces idées demeurent essentielles, et aujourd’hui, avec QS pour les soutenir, nous dit l’auteur, elles sont en meilleure position qu’elles ne l’ont jamais été.