Louis Gill
La crise financière et monétaire mondiale
La crise financière et monétaire mondiale, Louis Gill, Ville Mont-Royal, M Éditeur, 2011, 141 p.
Comme chacun sait, nous sommes en crise. Crise économique, crise financière, crise de la dette… Nous ne sommes pas simplement en crise, il semble aussi que les crises nous tombent dessus comme la misère sur le pauvre monde. Le plus troublant, c’est que plus les crises se multiplient, moins nous parvenons à comprendre quoi que ce soit à ce qui nous arrive. Honnêtement, est-ce que quelqu’un sait vraiment ce que peut bien manger en hiver une « dette souveraine », un subprime ou encore un credit default swaps ?
Heureusement pour nous, le 25 octobre dernier, l’économiste Louis Gill a lancé son dernier livre destiné justement à nous aider à y voir plus clair. Publié chez la toute jeune maison d’édition M, ce petit livre replace le cycle de crises dans lequel nous nous trouvons dans son contexte systémique. La crise financière n’est dès lors plus le résultat malencontreux de mauvaises actions perpétrées par quelques pommes pourries de la finance, mais la tendance structurelle du capitalisme contemporain. La crise ainsi resituée, recontextualisée, nous pouvons commencer à comprendre de quoi il en retourne. Il faut mentionner aussi que la forme retenue pour ce livre nous aide grandement à nous y retrouver. Textes courts, écriture claire, concise et efficace.
Bref, un livre pour les non-initiés, pour ceux et celles qui naviguent dans la tourmente de l’économie en se demandant où ils ont bien pu ranger leur boussole. Dans la masse d’informations qui nous sont transmises, je retiens trois idées fortes qui teintent l’ouvrage de la première à la dernière page.
D’abord un principe. Si les banques sont trop grosses pour tomber comme on nous le répète ; si, dans la tempête de la crise, il fallait absolument les sauver sur le dos des États et des peuples afin d’éviter une catastrophe pire que les dix plaies d’Égypte, nous sommes en droit de nous demander pourquoi diable ces banques ne sont pas socialisées. Un principe donc : trop grosses pour tomber, trop grosses pour être privées.
Ensuite, le poids structurel du capitalisme financier a atteint des proportions devenues grotesques. En 2007, le montant total de la capitalisation boursière mondiale, des titres de dette publique et privée et des actifs bancaires représentait 4,4 fois le produit mondial brut. Ce qui nous mène, selon les mots de Gill, à une finance « autistique (pathologiquement repliée sur son monde intérieur et ayant perdu contact avec la réalité) et entropique : énormes inputs à l’entrée, dérisoires outputs à la sortie, et entre les deux pure dissipation spéculative. »
Au final, le portrait que nous trace Gill du monde capitaliste est celui d’un système en état d’instabilité chronique que la multiplication des cycles de crise ne parvient pas et ne parviendra pas à réguler. Gilles Dostaler, dans son dernier livre, parlait des pulsions de mort du capitalisme. Il nous reste à espérer que l’éveil actuel des mobilisations contre ce système mortifère le fasse mourir avant nous.