Fernando Alvarez et al.
Médecine publique, médecine privée : Un choix de société
Médecine publique, médecine privée : Un choix de société, Fernando Alvarez et al., Montréal, Éditions du CHU Sainte -Justine, 2012
La question du mode de financement de la santé soulève les passions. Doit-elle être d’orientation publique ou privée, notre médecine ? C’est ce à quoi tentent de répondre les six auteurs qui ont collaboré au présent ouvrage.
Le Dr Alvarez lui-même aborde dans son texte l’énorme pression que subissent nos gouvernements pour ouvrir toutes grandes les portes du secteur public aux investissements privés par la déréglementation et la privatisation. L’auteur déplore le discours ambiant des grands médias qui ont entrepris « d’éduquer la population » afin qu’elle finisse par voir dans le privé la solution privilégiée à ce qu’ils aiment qualifier de « crise du secteur de la santé. »
Alors qu’André-Pierre Contandriopoulos s’attaque par la suite à déboulonner les mythes tenaces au sujet de l’incapacité de l’État à assumer les dépenses en santé, Marie-Claude Goulet illustre pour sa part la négligence et la complicité des services publics par rapport à leur propre privatisation. Elle aborde notamment les questions de la diminution de la couverture des soins depuis les années 80, de la surfacturation illégale de services médicalement nécessaires et de la dépendance envers les agences privées de soins.
On sourcillera par ailleurs en lisant des affirmations qui apparaissent simplifiées à l’excès dans le texte « PPP et sociale démocratie » de Marcel Boyer selon lequel l’imposition des normes du secteur privé par le gouvernement « garantira la qualité des biens et des services offerts. »
À ce même auteur qui fait reposer sur les épaules des patients eux-mêmes une grande responsabilité quant à l’amélioration de leur état de santé, le philosophe Daniel Weinstock semble répondre tout spécialement dans son propre texte où il traite de la justice en matière de santé. S’adressant à tous ceux qui ne veulent pas subir les effets de mauvais choix de vie, il écrit : « Dans la mesure où nous savons que les individus font souvent preuve d’irrationalité dans les choix qu’ils font concernant le domaine de la santé, le paternalisme de l’État semble justifié. » Le philosophe appelle aussi les gouvernements à investir davantage dans des secteurs comme le logement social et l’éducation, qui ont autant sinon plus d’impacts sur la santé des individus que les médecins et les médicaments.
Un ouvrage qui a en outre le mérite de forcer la réflexion et d’aider à mieux comprendre les tenants et aboutissants d’un débat complexe qui se déroule sur plusieurs fronts.