Jean-Marc Beausoleil
Le chrome et le noir. Lecture critique et amoureuse du graffiti montréalais
Jean-Marc Beausoleil, Le chrome et le noir. Lecture critique et amoureuse du graffiti montréalais, Montréal, Somme toute, 2020, 144 pages.
Mordu et pratiquant du graffiti, je dévore les rares bouquins qui se publient sur l’art de faire arabesques et fresques à l’aérosol ; plus illégalement que moins la plupart du temps. Apparemment modeste, cette plaquette d’un journaliste québécois tout terrain carbure à la littérature, au reportage et à une curiosité qui l’amène à fureter bien au-delà des chemins attendus : nous voici devant une surprise de taille. D’avoir sous-titré l’ouvrage « lecture critique et amoureuse du graffiti montréalais » admet d’entrée de jeu un biais passionnel. Mieux, celui d’une fascination aussi attentive que précieuse, l’auteur diversifiant sa galerie de personnages pour dépeindre un univers à la fois polymorphe et inattendu. On retrouve, outre des graffiteur·euse·s aux motivations parfois aux antipodes les unes des autres – il y a aussi des portraits de femmes, notamment une graffiteuse –, des photographes qui sont la mémoire de cet art éphémère, un revendeur d’aérosols spécialisés, sans oublier un effaceur de « vandalisme »… Peu de photos, par contre. Ici, ce sont les mots qui s’égayent, telles milles images. La qualité de ce texte, souvent buissonnier et poétique, réside au foisonnement des pistes. Pensons à cet éloge de l’amour de l’alphabet, à travers un reportage aussi inspiré qu’inspirant, qui amène à (re)considérer un art de la rue parfois périlleux, parfois entêté, mais aussi d’une farouche liberté, tel un patrimoine incontournable de l’espace urbain. Acte d’écologie artistique au plus proche du quotidien, que l’auteur relie aussi à des évènements – Undepressure ou Cannettes de ruelles – pour surligner le graffiti ; lui faire la fête.