John R. Macarthur
Une caste américaine : Les élections aux États-Unis expliquées aux Français
Lu par Mark Fortier
John R. Macarthur, Une caste américaine : Les élections aux
États-Unis expliquées aux Français, Paris, Les Arènes, 2008, 269 p.
John R. Macarthur appartient à l’aristocratie de la Nouvelle-Angleterre, la plus vieille souche de l’élite américaine. Il dirige le prestigieux magazine Harper’s, fréquente les salons où l’on croise les Rockefeller, ne manque de rien dont on fait une bonne vie, ni le prestige, ni l’argent, ni la culture.
Et pourtant, il s’inquiète de tout dans son plus récent ouvrage, Une caste américaine, où il défend avec de nombreux faits une thèse assez évidente, à savoir que la mécanique des institutions politiques états-uniennes est de part en part corrompue par les puissances de l’argent.
Aux États-Unis, observe-t-il, la vie politique est devenue un vaste système de trafic d’influence dirigé par d’opulents prébendiers. Républicains et Démocrates, remarque Macarthur, ne sont pas des partis politiques, mais d’immenses machines à collecter des fonds auprès d’individus et de groupes d’intérêts que ne manqueront pas de servir avec déférence les élus. Aussi, les 14 000 lobbyistes de Washington constituent-ils le véritable corps législatif du pays. En fait, les appareils républicains et démocrates forment à toute fin pratique les deux factions d’un parti unique greffé à l’appareil d’État, dont ils contrôlent la totalité des rouages.
Ces appareils sont d’ailleurs d’une efficacité redoutable. Aux États-Unis, 91 % à 99 % des parlementaires sortants sont réélus – la ville de Chicago est brutalement gouvernée depuis 1931 par la famille Daley – et le coût des dépenses électorales ne cesse de croître, rendant la participation politique hors de portée du citoyen. Les outsiders (Ross Perot, Howard Dean, le McCain de 2000), quant à eux, sont systématiquement combattus comme des corps étrangers par les deux grands partis, lesquels iront jusqu’à perdre une élection pour s’en débarrasser.
Aux États-Unis, où la magie des relations publiques transformen les héros en lâches (J. Kerry) et les lâches en modèles de virilité (G.W. Bush), la vérité, trop souvent, n’est qu’un mensonge réussi. Voilà qui n’est certes pas une primeur. Ce que Macarthur nous enseigne, par contre, c’est que le plus gros de ces mensonges est assurément celui qui colporte que ce pays est la première démocratie du monde.
Cette dérive ne date cependant pas d’hier. Le politologue conservateur Walter Lipmann constatait dès 1928 qu’un membre du Congrès était trop sollicité par les groupes particuliers, ces vers qui grouillent dans le cadavre de la république, pour avoir le temps de se soucier de ce détail qu’est le bien public.