Pulsations. Petite histoire du beat

No 073 - février / mars 2018

Antoine Ouellette

Pulsations. Petite histoire du beat

Claude Vaillancourt

Antoine Ouellette, Pulsations. Petite histoire du beat, Montréal, Varia, 2017, 258 pages.

Le musicologue et compositeur Antoine Ouellette nous arrive avec un livre singulier qui porte sur un aspect très particulier de la musique populaire d’aujourd’hui : l’omniprésence du beat. Selon l’auteur, « que nous ne vibrions plus qu’à ce beat, que ce beat soit quasiment une condition essentielle pour éveiller et maintenir notre intérêt musical, que cette attitude soit généralisée au point d’être un fait socio-musical dominant, voilà qui est symptomatique de quelque chose de profond ». Il cherche alors à comprendre notre obsession du rythme régulier et bien cadencé.

Après les avoir examinées attentivement, l’auteur écarte deux hypothèses qui peuvent rapidement venir à l’esprit. D’abord, la pulsation égale n’est « ni naturelle ni innée » ; elle est le résultat d’un apprentissage qui va à l’encontre des mouvements spontanés du corps, d’une grande irrégularité. Ouellette démontre ensuite que les rythmes entraînants et accélérés de la pop, qui en serait l’une des principales caractéristiques, le sont beaucoup moins qu’on le pense. La musique classique, par exemple, peut donner des leçons de rapidité rythmique aux groupes pop les plus festifs.

Avec une belle érudition musicale et par de nombreux exemples, puisés principalement dans les musiques du monde, le jazz et le classique, le musicologue montre à quel point des pièces avec des rythmes irréguliers ou sans batterie peuvent être agréables, imaginatives, stimulantes, tout en demeurant accessibles et populaires. Cette thèse, expliquée en faisant des liens avec sa propre expérience de musicien, est défendue de façon convaincante et nous force à nous questionner sur les limites d’une musique qu’on entend pourtant partout.

Parfois l’auteur se fait un peu moralisateur dans ses commentaires sur la musique pop, et les citations fréquentes du néoconservateur Allan Bloom ne viennent pas renforcer efficacement son propos. Il n’en reste pas moins que cet ouvrage clair et pédagogique est très pertinent dans sa dénonciation d’une uniformisation de la musique pop qui mène à un réel appauvrissement. Il nourrit une excellente réflexion sur une musique hégémonique dont le succès relève surtout du pur conditionnement. Ce qui vaut ici pour la musique s’appliquerait bien sûr à plusieurs autres aspects de la culture et de notre vie en société.

Thèmes de recherche Musique, Livres, Histoire
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