Les mesures du gouvernement Charest
Une offensive tous azimuts
par Alain Marcoux
Depuis l’élection du gouvernement libéral de Jean Charest, le 15 avril 2003, pas une semaine ne se passe sans que l’annonce d’une « nouvelle réforme » ne vienne illustrer plus clairement l’ampleur de la régression sociale à venir.
Des « mesures » qui, mises ensemble et non analysées isolément par les différentes forces du mouvement social, nous permettent de qualifier d’offensive brutale et générale contre les intérêts des classes populaires, la politique du gouvernement Charest. Sommaire non exhaustif… libéralisme oblige !
Pauvreté et loi 112
Cinq mois déjà et aucun plan d’action à l’horizon. Le gouvernement Charest agit déjà en violation complète de la loi visant à lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale (Loi 112). En effet, celle-ci obligeait le gouvernement à déposer un plan d’action au plus tard le 5 mai 2003. Notons par contre des coupures de l’ordre de 27 M$ affectant les programmes d’aide à l’emploi en 2003-2004 et le retour à une application accrue des pénalités à l’aide sociale. Toujours pas de gratuité des médicaments en vue pour les personnes assistées sociales et les personnes âgées recevant le supplément de revenu garanti. Plus encore, les salariées ne bénéficiant pas de programme d’assurance médicaments dans leur entreprise devront assumer une hausse de primes du Régime d’assurance médicaments.
Aide sociale
Le ministre de l’Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille, Claude Béchard, a fait connaître en juillet sa « nouvelle philosophie » de l’Aide sociale. Celle-ci consiste à appliquer « avec plus de rigueur et de façon plus systématique » les mesures de pénalités existantes à l’Aide sociale. Pénalités de l’ordre de 75 $ à 150 $ par mois pour les bénéficiaires refusant les mesures d’aide à l’emploi du ministère.
Droit des salariés
La première mesure libérale fut d’exclure de l’application du salaire minimum les travailleurs et travailleuses effectuant des travaux saisonniers : récolte des fruits et légumes, travaux agricoles, etc. Le gouvernement Charest entend dispenser les petites entreprises de l’obligation de participer à la formation continue de ses salariées.
Le projet de loi 7, modifiant la Loi sur les services de santé et des services sociaux, enlève à un peu plus de 5 000 travailleurs et travailleuses « atypiques » du réseau de la santé et des services sociaux (intervenantes de ressources intermédiaires et de type familial) le droit de se syndiquer. Aussi, le projet de loi no 8, loi modifiant la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l’enfance prévoit que les personnes responsables d’un service de garde en milieu familial, par un titulaire de permis de centre de la petite enfance, ne pourront être reconnues comme salariées et donc se prévaloir du droit de se syndiquer.
Après la restriction du droit à la syndicalisation, le démembrement de l’article 45 du Code du travail est l’autre objectif des libéraux de Jean Charest. Lors d’une allocution prononcée le 8 mai dernier aux assises de l’Union des municipalités, à Gatineau, le ministre des Affaires municipales, du Sport et des Loisirs, Jean-Marc Fournier, assurait aux municipalités « une plus grande autonomie, en modifiant l’article 45 [..] afin de permettre aux municipalités de recourir davantage à la sous-traitance ».
Protection des locataires et logement social
Dès son élection et alors que sévit une grave crise du logement, le gouvernement Charest donne son aval à la décision de la Régie du logement de confier au groupe conseil Roche, une société proche du Parti libéral, le processus de « consultation » privé sur le Règlement sur les critères de fixation du loyer et visant à revoir la méthode de « contrôle des loyers » au Québec.
Au début juillet, le budget destiné à l’entretien des habitations à loyer modique (HLM) et de certaines coopératives d’habitation est amputé de 25 %.
Aucune annonce satisfaisante concernant les 58 M$ (en cinq ans) nécessaires à l’atteinte de l’objectif de création de 13 000 logements sociaux dans le cadre des programmes AccèsLogis et Logement abordable. Silence sur les 70 M$ (en cinq ans) devant permettre d’augmenter la réalisation de logements sociaux tel qu’annoncé dans le budget fédéral de février 2003.
Garderies et services de garde en milieu scolaire
La consultation sur le financement et le développement des services de garde prévoit trois scénarios. De l’augmentation de tarif (de 5 $ à 7 $) à une augmentation au niveau de 20 % des coûts des services de garde en passant par une tarification en fonction du revenu, une seule logique : l’augmentation des tarifs. La menace pèse aussi sur les services de garde en milieu scolaire. L’augmentation des tarifs des services de garde pourrait servir à combler les 90 M$ de compressions affectant le budget des commissions scolaires. Le gouvernement Charest donnerait une large part des 12 200 places de garderie à développer en 2005-2006 aux garderies commerciales, au détriment des Centres à la petite enfance (CPE).
Et ça continue…
Hausse de 6 % des tarifs d’Hydro-Québec, contribution des prisonniers aux frais reliés à leur incarcération, aucun réinvestissement budgétaire pour les universités et cégeps, possible dégel des frais de scolarité, révision du programme d’assurance automobile et du principe du « no fault », nouvelle ère de construction de barrages hydroélectriques, coupures dans les budgets du ministère de l’Environnement, etc., etc., etc.