Secret et violence, chronique des années rouge-brun (1920-1945)

No 015 - été 2006

Georg K. Glaser

Secret et violence, chronique des années rouge-brun (1920-1945)

lu par Claude Rioux

Claude Rioux

Georg K. Glaser, Secret et violence, chronique des années rouge-brun (1920-1945),
Agone, coll. « Marginales », Marseille, 2005 (1ère édition 1951), 569 p.

Secret et violence, de Georg K. Glaser, est une sorte de « roman autobiographique » où l’auteur, se rebaptisant Valtin, témoigne de cette jeunesse allemande qui a vu la montée du fascisme. Jeune vagabond bourlinguant entre les maisons de redressement, les asiles et les prisons, il adhère au Parti communiste allemand dès l’adolescence. Valtin est témoin de la dérive sectaire du Parti qui, minimisant la force du nazisme, préfère s’attaquer aux « sociaux-traîtres » socialistes – avec les conséquences que l’on connaît. En cela, Secret et violence n’est pas sans rappeler un livre écrit par un autre Valtin, Sans patrie ni frontières [1], lequel nous entraînait également dans les bas-fonds fréquentés par les militants communistes des années 1920 et 1930.

Le Valtin de Georg K. Glaser participe à la lutte armée clandestine contre Hitler avant de s’exiler en France d’où il rejoint l’armée française pour finalement être fait prisonnier par les Allemands. Ironie de l’histoire, il est emprisonné dans la ville qui l’a vu naître et où il a connu la violence de son père, au sujet duquel il écrit : « Il avait mis huit enfants au monde et tout fait pour les voir presque aussitôt rendre l’âme ». Valtin échappe au peloton d’exécution grâce à son statut de prisonnier de guerre français. La relation de ces années de captivité est sans doute la partie la plus poignante du livre. Avoir résisté toute sa vie à la violence paternelle, puis patronale et enfin fasciste, donne à Valtin une profondeur de vue extraordinaire sur sa condition et son époque, qu’il partage dans les observations portées sur sa condition d’intellectuel (il est écrivain) et de manuel (il est également ouvrier tourneur), sur son amour pour la liberté (« c’est moi qui ai toujours choisi mes causes ») et sur la peur – Max-Pol Fouchet dira, dans une critique de la première édition parue en 1951, que Glaser « a compris, dès l’adolescence, que les hommes n’ont trouvé qu’un remède contre leur peur : faire peur, rejoindre ce qui fait peur. »


[1Jan Valtin, Sans patrie ni frontières, Actes Sud, coll. « Babel », Paris, 1997 (1ère édition originale en anglais 1947).

Thèmes de recherche Livres, Histoire
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