Le retour de l’histoire. Conflits et migrations au 21è siècle

No 074 - avril / mai 2018

Jennifer Welsh

Le retour de l’histoire. Conflits et migrations au 21è siècle

Benjamin Pillet

Jennifer Welsh, Le retour de l’histoire. Conflits et migrations au 21è siècle, Montréal, Boréal, 2016, 280 pages.

Le titre de l’essai de Jennifer Welsh, s’inscrivant en porte-à-faux de la célèbre thèse de Francis Fukuyama, laisse entendre que son propos contiendra une critique de la thèse en question.

C’est donc avec une certaine déception que l’on réalise très rapidement que loin de s’avérer une critique des dérives d’un capitalisme libéral plus que jamais boursouflé, le livre de Jennifer Welsh ne présente rien d’autre qu’une énième défense de cette idéologie. En effet, si la pensée de l’auteure remet parfois en question l’optimisme de Fukuyama, c’est moins pour en fournir une critique réelle que pour lui apporter un léger bémol. La thèse est en effet simple, à la limite du simplisme : loin d’avoir représenté l’avènement d’une humanité libérée de ses chaînes, l’hégémonie libérale ayant succédé à la chute du Bloc soviétique ne s’est avérée qu’une énième ère civilisationnelle ponctuée par des conflits, des inégalités et des épisodes de barbarie. Il s’agit donc, pour Welsh, de défendre la « démocratie », réduite à ses avatars représentatifs et libéraux, en la confrontant à quelques exemples de ce « retour de l’histoire », qu’elle décrit sous la forme du terrorisme islamiste, des migrations de masse et de la géopolitique russe.

Outre l’angélisme avec lequel est peint le libéralisme, de même que les innombrables portes ouvertes que l’auteure s’empresse d’enfoncer, il est frappant de considérer à quel point le propos du livre est aveugle. Le « retour de l’histoire » n’est en effet perçu que sous une loupe négative, sans égard (et sans références) aux nombreux mouvements intellectuels et sociaux (marxistes, postcoloniaux, etc.) qui, depuis trente ans, se proposent de critiquer et de dépasser l’hégémonie libérale ; des critiques qui, contrairement aux exemples mobilisés par Welsh, ne trouvent pas leur origine dans le déni des objectifs de liberté démocratique, mais plutôt dans leur réalisation.

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