Arianna Huffington
L’amérique qui tombe
Comment les politiques ont trahi le rêve américain et abandonné la classe moyenne
Arianna Huffington, L’amérique qui tombe ; comment les politiques ont trahi le rêve américain et abandonné la classe moyenne, Paris, Fayard, 2011, 371p.
Arianna Huffington dénonce ici sans ménagement ceux qui, à ses yeux, ont engagé les États-Unis sur une voie qu’elle qualifie de « dangereuse » (p. 10), c’est-à-dire : la tiers-mondialisation des USA. Rien de moins ! À ce sujet, elle écrit : « L’objectif de ce livre est de donner l’alerte pour nous épargner de devenir un État du tiers-monde » (p. 11) ; « Si nous ne revenons pas à la raison et ne révisons pas nos priorités chamboulées, l’Amérique pourrait perdre son rang de superpuissance et se voir reléguée à celui de pays du tiers-monde […] » (p. 59). Par pays du tiers-monde elle entend : « un endroit où n’existent que deux classes sociales : les riches… et tous les autres » (p. 16).
Le déclin qu’elle anticipe est imputable « à la cupidité de son élite économique et à l’indifférence de ses dirigeants élus » (p. 16). De manière plus précise, elle avance que les responsables du fiasco actuel sont les « flexiens », c’est-à-dire : « Les acteurs principaux qui passent d’un rôle à l’autre au sein du gouvernement, dans le monde de l’entreprise et dans celui des groupes de réflexion, collectant des informations confidentielles à chaque étape et exploitant ce privilège à leur profit et à celui de leurs alliés » (p. 205). Bref, ce sont les membres de cette « ténébreuse élite » (p. 205) économique et politique qui sont à l’origine de l’adoption de différentes mesures ayant eu pour effet de saper les assises économiques d’un trop grand nombre de membres de la classe moyenne américaine. Classe moyenne qui s’apparente à une « espèce en danger » (p. 17) de « disparaître complètement » (p. 36).
Qu’on se le dise, le livre de cette journaliste ne correspond pas aux exigences d’un ouvrage scientifique. Il s’agit d’un long brûlot qui se divise en cinq chapitres (il n’y a ni introduction ni conclusion). Elle présente un nombre assommant de données quantitatives puisées ici et là à différentes sources. Cette longue présentation de données empiriques a pour effet de nous dresser un tableau très sombre de ce qui se passe aux États-Unis. L’absence d’une analyse rigoureuse des phénomènes qui ont eu (et qui ont toujours) pour effet d’éroder les effectifs de la classe moyenne (pensons ici à la financiarisation de l’économie, à la relocalisation d’entreprises et au désengagement de l’État accompagné « d’une baisse d’impôts au profit de l’élite possédante » (p. 73), etc.), débouche sur une présentation franchement alarmiste. Le plan d’action qu’elle met de l’avant « pour éviter la chute » (chapitre 5) comporte certaines mesures qui relèvent de la naïveté crasse. Sans blague, elle invite, entre autres choses, les victimes de la crise économique à faire preuve de « résilience » (p. 280), à garder « la foi » (p. 282), à adopter « une bonne attitude » (p. 284) et à faire « du bénévolat » (p. 285). Ce livre s’adresse au lecteur lambda et aux personnes qui aiment les démonstrations simplistes.