Dossier : Après-crise ou crise permanente ?
Le diagnostic... mais pas le remède
De plus en plus, chez les grands capitalistes, on reconnaît avec une certaine justesse les importants problèmes contemporains. Le Forum économique de Davos, par exemple, fait preuve depuis quelques années d’une certaine lucidité à laquelle nous n’étions pas habitué·e·s.
Depuis trois ans, les inégalités sont perçues comme l’un des plus importants facteurs de risque pour la stabilité sociale et pour la sécurité de la planète. Un coup d’œil sur le programme des conférences de cette année permettait de constater qu’on s’inquiétait du réchauffement climatique, du mauvais état des océans, du chômage, surtout chez les jeunes, de l’endettement trop élevé des étudiant·e·s aux États-Unis, de l’obsession du profit chez les entrepreneurs, etc.
De pareils constats porteraient à croire que des solutions vigoureuses seraient envisagées pour combattre ces fléaux. Celles qui sont proposées laissent cependant pantois. On compte sur des innovations technologiques, dont certaines encore inexistantes, pour régler une partie de ces problèmes. On propose plus de libre-échange et moins de protectionnisme. Et surtout, on implore une croissance toujours sur le point de se montrer le bout du nez pour reléguer tous les problèmes dans l’ombre.
Cette situation de dissonance cognitive a plusieurs causes. Appliquer des solutions qui résoudraient radicalement les problèmes reviendrait à retirer de nombreux privilèges aux dominants. Rien dans leur expérience et dans leur formation intellectuelle ne leur permet d’envisager des changements hors du cadre strict et contraignant de leurs apprentissages. Les profits immédiats d’une bonne affaire conclue à l’instant vaudront toujours mieux que des mesures prises à long terme pour la bonne santé des peuples et de la planète.
C’est pourtant à une élite obtuse et cupide, composée de richissimes gens d’affaires et de politicien·ne·s à leur service, que l’on a confié des pouvoirs qui dépassent l’entendement. L’évidence des cataclysmes qui s’accumulent la force à poser de meilleurs diagnostics. Que faudra-t-il donc pour que l’on applique enfin les bons remèdes ?