Éditorial du no. 33
Une décennie
Au terme de cette première décennie des années 2000, quelques membres du collectif de rédaction ont relevé trois bons coups et un espoir pour la gauche et les mouvements sociaux au Québec et ailleurs dans le monde.
1. La bête est en pleine lumière. Amorcé de belle façon en 1999, à Seattle, un large mouvement de protestation contre la globalisation de l’économie n’a cessé de prendre de l’ampleur tout au long de la décennie et contribué à mettre en pleine lumière les institutions qui travaillaient dans l’ombre, et à l’échelle planétaire, au service des intérêts dominants (FMI, OCDE, Banque mondiale, notamment). On en récolte aujourd’hui les fruits, dans les Forums sociaux et mille autres lieux.
2. L’écologie est devenue une réelle préoccupation, à tout le moins dans le grand public et dans les mouvements sociaux.
3. Dans la conversation démocratique, Internet et les nouveaux moyens de communication apportent un indispensable contrepoids aux médias traditionnels.
Un espoir : Nous manquons encore et toujours cruellement de modèles économiques alternatifs crédibles capables d’inspirer des pratiques qui traceraient la voie vers de nouvelles manières de produire, de consommer et d’allouer des ressources de manière équitable, solidaire, autogérée, écologique, tout en offrant une réelle diversité de biens et services. Au travail !
Normand Baillargeon
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1. Les forums sociaux. Qu’ils soient régionaux ou mondiaux, les forums sociaux ont formé un vaste mouvement de résistance et permis d’élaborer et de diffuser un solide contre-discours à la pensée unique néolibérale.
2. L’effondrement de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) : l’échec des négociations à l’OMC a fait la preuve que concevoir un vaste marché mondial sans aucune contrainte, et dans lequel tout serait à vendre, n’était que pure folie.
3. La démonstration flagrante que la déréglementation mène à des cataclysmes en série. Dommage que cela se soit produit au détriment de millions et de millions de pauvres qui paieront encore longtemps pour tant d’irresponsabilité.
Un espoir : Que les banquiers, chefs d’État, grands patrons, économistes enrégimentés et autres obsédés du profit à tout prix aient peur des désordres qu’ils créent et qu’ils soient condamnés à faire un stage de deux ans dans une des zones sinistrées que leurs politiques ont fait proliférer.
Claude Vaillancourt
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1. L’intégration des dispositions concernant le harcèlement psychologique dans la Loi sur les normes du travail. L’employeur doit veiller à ce que ses salariéEs ne subissent pas de conduites vexatoires portant atteinte à leur dignité ou à leur intégrité physique ou psychologique.
2. La création du Régime québécois d’assurance parentale permet aux travailleuses et travailleurs – salariés ou autonomes – de concilier leurs responsabilités professionnelles et familiales grâce au versement de prestations pendant leur congé de maternité, de paternité, parental ou d’adoption.
3. Les travailleuses et travailleurs de Walmart Jonquière pour avoir amené devant la Cour suprême du Canada la question de la fermeture anti- syndicale de leur magasin. Évidemment, la décision de la Cour est extrêmement décevante, voire déprimante, mais leur détermination permettra de faire évoluer le débat sur le respect de la liberté d’association au Québec et inspirera d’autres citoyennes et citoyens.
Un espoir : Que la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale en soit vraiment une ! En d’autres mots, que l’État prenne ses responsabilités pour la rendre effective et efficace. Et tant qu’à y être, qu’il prenne de sérieuses mesures permettant de lutter activement contre l’itinérance, et non contre les itinérantes et itinérants.
Léa Fontaine
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1. Avril 2001 : Paul Cliche, candidat indépendant appuyé par tous les partis de gauche unis pour une première fois, obtient 24,24 % des votes lors de l’élection partielle de Mercier.
2. Juin 2002 : tous les partis de gauche s’unissent pour n’en former dorénavant qu’un seul : l’Union des forces progressistes (UFP), qui entamera en 2004 des négociations avec Option citoyenne, un mouvement politique issu des milieux sociaux et communautaires.
3. Février 2006 : la fondation de Québec solidaire, mariage de l’UFP et d’Option citoyenne, lors d’un congrès réunissant plus de 1 000 personnes.
Un espoir : L’élection d’Amir Khadir, le 8 décembre 2008 dans Mercier, premier député de Québec solidaire à l’Assemblée nationale. Cette gauche des années 2000 s’est construite sur la base et au travers des luttes sociales et elle a su développer une nouvelle culture politique : démocratique, pragmatique et ancrée dans la réalité. Vivement la suite !
Monique Moisan
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Trois grandes mobilisations populaires ont été révélatrices de la prise de conscience des QuébécoisEs au sujet des enjeux suscités par la mondialisation néolibérale :
1. Le contre-Sommet des Amériques à Québec en 2001. Un autre monde est possible.
2. Le refus de participer à la guerre-invasion de l’Irak en 2003.La guerre n’est pas une option.
3. L’opposition citoyenne contre la centrale du Suroît en 2005. L’environnement n’a pas de prix.
Un espoir : Que dans la prochaine décennie ces mobilisations se perpétuent pour accroître le pouvoir de la société civile à influencer le politique et qu’À bâbord ! soit toujours là pour en faire part...
Luciano Benvenuto
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1. La fin de la première décennie du troisième millénaire se termine en récoltant les fruits qu’elle avait semés à la fin du millénaire précédent. De Seattle à Sao Paulo, en passant par Québec, voici maintenant Copenhague, comme nouveau théâtre du « Refus global ». De la rue, l’affirmation des peuples s’est maintenant déplacée jusqu’aux sièges mêmes des Nations unies, alors qu’un Indien de Bolivie redonnait sens et vie au tiers-mondisme en s’opposant à « l’accord » imposé par les pays les plus puissants de la planète, qui balayait du revers de la main tout le processus de négociations entrepris depuis Kyoto.
2. Que ce refus soit d’abord assumé par un « Indien d’Amérique » est symptomatique du « virage à gauche » du subcontinent. Depuis l’élection de Chávez au Venezuela puis de Lula au Brésil, il y a eu celle de Morales en Bolivie, de Correa en Équateur, du Frente Amplio en Uruguay, de Lugo au Paraguay, et ainsi de suite...
3. Virage à gauche que d’aucuns appellent le « retour du populisme »...cachant mal leur peur et leur mépris d’un retour des peuples comme acteurs protagonistes de leur histoire. Retour qui, rappelons-le, a précédé l’arrivée au pouvoir de gouvernements « représentant » leurs aspirations.
Un espoir : Après les résistances des années 1990 où la mondialisation néolibérale prétendait avoir dépassé le cadre des États nations, voici le retour de la souveraineté des peuples. Espérons que cette souveraineté parviendra à s’enraciner dans des projets créateurs.
Ricardo Peñafiel