Wilhelm Reich
Qu’est-ce que la conscience de classe ? Contribution au débat sur la reconstruction du mouvement ouvrier
Wilhelm Reich, Qu’est-ce que la conscience de classe ? Contribution au débat sur la reconstruction du mouvement ouvrier, Montréal, M Éditeur, 2018, 143 pages.
Est-on réellement en présence de cet ouvrage que la quatrième de couverture décrit comme « toujours actuel » et susceptible d’apporter des réponses solides et contemporaines à ces interrogations fondamentales ? « Mouvement ouvrier », « mouvement de salariéEs », « mettre fin au système qui les exploite », qu’est-ce à dire ? « Reconstruire », « expliquer », « ne se mobilise pas », il s’agit là d’un choix de mots et de verbes qui, loin d’être passifs, semblent indiquer la direction des actions à mettre en branle et qui auront pour effet de conduire l’humanité inévitablement et irréversiblement vers un avenir émancipateur, égalitaire, ayant enfin supprimé les lendemains qui déchantent ? Appliquons les freins à cet enthousiasme prométhéen !
Initialement publié en 1934 (sous le pseudonyme d’Ernst Parell), le livre aborde, en partie, certains aspects qui ont concouru à la perte d’influence du mouvement révolutionnaire prolétarien auprès des larges masses. Reconnaissons-le, le mouvement communiste international n’a pas été en mesure de renverser le capitalisme, ni non plus de vaincre la bourgeoisie. Pourquoi en est-il ainsi ? Reich avance la piste suivante : la bureaucratisation des dirigeants révolutionnaires. Ce qui n’est pas faux. Mais, il existe d’autres facteurs susceptibles de nous aider à comprendre pourquoi la révolution bolchévique a achoppé une fois les anciennes élites dirigeantes limogées et renversées. La « masse » ne souhaitait pas réellement faire la révolution communiste. Pourquoi donc ? Reich y répond comme suit : « Or, le sentiment des larges masses est décisif : elles redoutent la violence, désirent la paix et la tranquillité et ne veulent donc pas entendre parler de communisme ».
Soyons clair, ce livre, hélas n’offre aucune « recette » pour « reconstruire le mouvement ouvrier et reprendre l’offensive ».
Force est de reconnaître que nous vivons dans une société au sein de laquelle nous retrouvons des individus assujettis au régime salarial prolétarisé. L’acteur collectif incarnant ou représentant ce groupe est inexistant. Voilà pourquoi les luttes sociales actuelles ne se métamorphosent pas en luttes visant la transformation radicale de la société. L’ancien mouvement porté par une mystique libératrice radicale a été littéralement dissout sans guère laisser de traces apparentes. Le problème que nous rencontrons de nos jours peut s’énoncer de la manière suivante : comment se réalise dans le monde contemporain des sociétés dites développées le lien entre le moi et le collectif ? Et comment donc repérer à nouveau cet insatiable acteur collectif censé détenir des réponses sur l’avenir qui nous guette ? Seul l’écho de ces interrogations nous revient au visage en ce moment…