Manifeste animaliste. Politiser la cause animale

No 070 - été 2017

Corine Pelluchon

Manifeste animaliste. Politiser la cause animale

Émilie Deschamps

Corine Pelluchon, Manifeste animaliste. Politiser la cause animale, Paris, Alma Éditeur, 2017, 111 pages.

Constat de départ : depuis la publication d’Animal liberation en 1960, le discours rationnel n’a pas réussi à transformer en profondeur la condition animale. Corine Pelluchon propose donc de transposer la cause sur le terrain politique. Elle envisage ainsi la création d’un parti animaliste et l’inclusion des intérêts des animaux dans la constitution. Elle défend même l’ajout d’un siège pour une personne représentant les animaux aux assemblées législatives.

Si les propositions sont bien étayées, la discussion s’embourbe parfois dans les détails : le mode de rémunération des représentant·e·s politiques et la longueur de leurs mandats par exemple. Un optimisme teinté de naïveté émane aussi de certaines suggestions. Ainsi, l’idée qu’un soutien financier permettra une transition en douceur de l’élevage intensif vers l’agriculture néglige le rôle identitaire important des croyances, traditions et valeurs soutenant l’industrie de l’élevage.

Visant avant tout un changement rapide des pratiques, le texte se conclut sur des propositions se voulant consensuelles telle l’interdiction de la fourrure, du foie gras ou de la corrida. Ce sont là, selon Pelluchon, les batailles les plus faciles à gagner pour les défenseurs des animaux ; celles sur lesquelles miser pour progresser significativement et à court terme.

Entre discussion sur les actes militants, introduction à l’éthique animale, ébauche de programme politique et appel à l’union des « animalistes de tous les pays », le Manifeste s’adresse un peu à chacun·e, mais à personne en particulier : qui trop embrasse mal étreint, dit le proverbe.

La brièveté et la clarté de l’ouvrage, qui contient même un glossaire, en font toutefois un point de départ de choix pour les débats futurs. Et en accordant plus d’attention aux fins qu’aux principes, l’auteure transgresse les distinctions idéologiques entre les différents groupes de défenseurs des animaux, distinctions qui peuvent devenir des freins au réel progrès. Le séjour de l’éthique animale dans le lumineux monde des idées a peut-être assez duré. Et c’est une philosophe qui vient aujourd’hui nous dire de redescendre dans la caverne pour mettre en place la vraie libérationanimale.

Thèmes de recherche Livres, Droits des animaux
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