Automne rouge

No 070 - été 2017

André-Philippe Côté et Richard Vallerand

Automne rouge

Valentin Tardi

André-Philippe Côté et Richard Vallerand, Automne rouge, La Pastèque, 2017, 104 pages.

L’automne est une saison négligée dans la littérature québécoise. À tort. En effet, ce roman graphique mené tambour battant utilise avec sagacité cette saison comme métaphore – voire comme un exutoire – des années 1970 au Québec… Paradoxalement, cette saison, associée à la mort, voit culminer tous les atouts de la nature, que ce soit le temps des récoltes et l’explosion de couleurs vives des arbres feuillus. Justement, André-Philippe Côté, vétéran de la BD québécoise (notamment avec Baptiste le clochard et Victor et Rivière) et caricaturiste pour La Presse et Le Soleil, campe son scénario dans la société québécoise de la crise d’Octobre, en 1970.

Ce roman graphique dessiné efficacement par Richard Vallerand (« Les Laborats » dans le magazine Curium) a le grand mérite de mettre en perspective une galerie de personnages qui permettent de multiplier les points de vue de lecture en favorisant l’immersion dans le contexte d’une période historique sur laquelle l’Histoire est quasi muette, quand elle ne l’occulte pas carrément.

Jason, un personnage pivot plutôt que central, est un garçon de 13 ans. Le milieu scolaire est utilisé pour introduire un double enjeu : celui d’un héros québécois que les étudiant·e·s auront à imaginer ainsi que celui des questions autochtones qui cheminent en parallèle avec un autre élève un temps intimidateur. Des pages du journal personnel tirées d’un cahier d’exercices « Québec » (et non un « cahier Canada ») de Jason s’intercalent de loin en loin dans cette histoire aux rebondissements multiples et diablement crédibles. La mère de Jason, négociatrice syndicale, est dépeinte en lutte avec les travailleurs·euses de l’Hôtel Champlain, tandis que sa sœur – qui se trouve à l’origine être sa mère (!) – ajoute un aspect libertin puisqu’elle travaille dans un bar et consomme de la drogue.

On le constate, ce roman graphique s’avère étonnamment dense… Un fil conducteur traverse ce livre grisant : l’idée omniprésente d’un imaginaire québécois en émergence, de personnes engagées à différents niveaux dans la société et, plus largement, de combats à mener concrètement pour que les choses aboutissent. Action directe, politique démocratique, syndicalisme, féminisme et autres sont parmi les éléments en cause dans cette fiction pour le moins inspirée.

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