L’autonomie au féminin

No 058 - février / mars 2015

Afrique

L’autonomie au féminin

Ghislaine Sathoud

Le 1er novembre 2014, l’Afrique célébrait la Journée de la jeunesse africaine. Alors que la problématique de l’égalité des sexes occupe une place prépondérante dans les préoccupations exprimées par diverses organisations, des voix de plus en plus nombreuses s’élèvent en Afrique pour réclamer l’amélioration de la condition féminine.

« Il y a un fait presque immuable : malgré les différences, les filles reçoivent moins de privilèges que leurs congénères masculins à l’échelle du continent. »

Dans un continent où certaines traditions enferment les femmes dans des clichés rétrogrades, les jeunes filles, elles, veulent prendre en main leur avenir ; elles veulent être perçues comme des actrices du développement. Une évidence s’impose : d’une manière générale, la jeunesse de ce continent, où 40 % de la population a moins de 15 ans, souhaite devenir acteur de sa destinée.

Un bref historique

En poussant plus loin nos réflexions, nous pouvons dire que les responsables politiques manifestent – théoriquement du moins – la volonté de porter un regard plus attentif sur les discriminations sexistes. C’est dans cette optique que s’est déroulée la 9e édition de la Journée de la jeunesse africaine ayant pour thème « Autonomiser les jeunes filles à travers l’Agenda 2063 ».

Il fut un temps où l’autonomie économique des femmes était reléguée au second plan. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles la scolarisation des filles n’était pas une priorité. Cette situation contribuait à renforcer les inégalités entre les Africaines et les Africains. Ce n’est pas pour rien que des organisations montent au créneau pour réclamer des changements. C’est à cette exigence que répondent enfin les autorités africaines. En agissant ainsi, elles s’attaquent à des phénomènes sociaux longtemps décriés. Au fond, cette initiative montre l’ampleur de la mobilisation sur la problématique du respect des droits des femmes.

Notons que c’est l’Union africaine qui se trouve à l’origine de cette Journée, organisation politique qui regroupe tous les pays du continent à l’exception du Maroc. Parmi ses réalisations, on peut citer l’adoption en 2013 de la Déclaration d’Addis-Abeba sur l’élimination de la discrimination et de la violence contre les filles en Afrique. L’objectif est alors clairement exprimé : garantir sans distinction les droits fondamentaux de la jeunesse. Avec ces nouvelles réalités, peut-on s’attendre à des changements concrets dans la vie quotidienne des Africaines ?

Des divergences basées sur le genre

Comme c’est le cas dans plusieurs endroits sur la planète, les filles en Afrique endurent bien des épreuves. Dans ce contexte, les frustrations s’accumulent. En tout cas, il faut souligner que dans les situations de conflit armé les filles sont à coup sûr exposées à des violences – les attaques perpétrées par Boko Haram n’en sont que les plus récentes illustrations. Dans le même ordre d’idée, Olara Otunnu, ancien Secrétaire général adjoint et Représentant spécial du Secrétaire général, avait abordé à maintes reprises les exactions commises en Sierra Leone quand il exerçait ses fonctions. Des organismes comme Amnistie internationale et bien d’autres évoquent également ces problématiques. On peut aussi nommer le triste sort des filles atteintes d’albinisme, cette maladie qui se caractérise par la dépigmentation de la peau et des yeux.

Il n’y a aucun doute, certaines coutumes – pas toutes, heureusement ! – sont préjudiciables à l’épanouissement de la gent féminine. Un fait mérite d’être mentionné : l’Afrique est plurielle. Ce qui revient à dire que les us et coutumes varient selon les pays, une analyse homogène et englobant toute l’Afrique serait un raccourci. Cependant, il y a un fait presque immuable : malgré les différences, les filles reçoivent moins de privilèges que leurs congénères masculins à l’échelle du continent.

Les discriminations sexistes commencent très tôt et elles se poursuivent tout au long de la vie des Africaines. Par exemple, les mariages précoces sont des faits souvent évoqués quand vient le temps de s’intéresser aux difficultés qu’éprouvent les filles. Ces dernières années, avec la mondialisation, on assiste également à un essor de la pornographie infantile, du tourisme sexuel et de la traite des enfants. D’où la nécessité de renforcer les mécanismes de protection juridique.

* * *

En définitive, le moins que l’on puisse dire, c’est que la jeunesse veut prendre sa place dans la société. Qu’il s’agisse de la vie politique ou des questions relatives au développement du continent, les jeunes, tous genres confondus, occupent les tribunes pour revendiquer leurs droits. Une chose est sûre, il est important de poursuivre la sensibilisation afin de trouver des réponses appropriées aux difficultés constatées sur toute l’échelle du continent.

C’est la raison pour laquelle la volonté des autorités africaines de porter un regard sur la condition de cette population, qui subit des inégalités liées au genre, fait souffler un vent d’espoir. Peut-on penser que les Africaines sont à présent libérées des multiples influences qui les confinent dans des rôles secondaires ?

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