Éducation à la sexualité
Points de vue de trois professeurs
Que pensent les membres du corps professoral de ce nouveau chapeau d’éducateur sexuel qui leur est imposé ? Sont-ils motivés ? Se sentent-ils aptes ? Ont-ils accès à des ressources et à du support ? Voilà autant de questions que nous avons posées à trois d’entre eux.
Enseignante en arts plastiques au secondaire
Elle considère l’éducation sexuelle comme étant essentielle pour les jeunes et bien qu’elle souhaite intégrer cette « discipline interdisciplinaire » dans le cadre de ses cours d’arts plastiques, elle avoue ne bénéficier ni des ressources, ni du soutien de la direction de son école. « Il y a une certaine hypocrisie concernant la réforme en éducation. Tout le monde se plaint du manque de soutien mais tous se mettent aussi la tête dans le sable ! On se renvoie la balle de part et d’autre sans jamais prendre nos responsabilités. » Elle affirme être en désaccord avec le fait que l’éducation à la sexualité soit la responsabilité de tous les enseignants, d’autant plus qu’ils ne sont pas formés pour ce faire : « Nous n’avons même pas de cours portant là-dessus dans notre formation d’enseignant. » Parmi les pistes de solution, elle considère que la présence d’éducateurs-sexologues dans les écoles et l’ajout d’un cours spécifique sur le sujet sont les voies à privilégier.
Enseignant de science et technologie de 4e secondaire
Ce professeur d’expérience doit maintenant aborder la reproduction et la sexualité avec sa classe. Or, malgré son grand intérêt à aborder cette matière, il déplore le manque de soutien et de coopération du personnel de l’école. Ainsi, durant toute l’étape, l’infirmière n’est même pas venue une seule fois, au moins pour parler de contraception. « Tout le monde déplore la réforme et son application mais en même temps, on se déresponsabilise. On s’en lave les mains. » Par contre, il croit qu’avant de baisser les bras et d’abandonner la réforme, comme plusieurs de ses collègues le souhaitent, il faudrait au moins essayer de l’appliquer. Ainsi, il considère que la meilleure solution à envisager est de former adéquatement le corps professoral et de le soutenir dans ses tâches : en offrant d’abord de la formation continue et ensuite un meilleur encadrement qui permettrait de définir plus clairement les objectifs liés à l’éducation à la sexualité. Il pense également que le programme de baccalauréat en enseignement devrait être adapté à la réforme et offrir les formations nécessaires, notamment en matière d’éducation sexuelle. Enfin, il considère essentiel que des ressources compétentes soient présentes dans les écoles, soit des éducateurs-sexologues.
Enseignant de français au secondaire
Bien qu’il croit au bienfait de l’éducation à la sexualité pour les élèves du secondaire, ce jeune enseignant n’est nullement intéressé à en assumer la responsabilité. « D’abord, parce que cette façon de faire ouvre la porte à des glissements de terrain importants, où on laisse trop de place à l’opinion personnelle de chaque professeur et ensuite parce que je n’ai pas envie de me faire poursuivre par des parents qui ne partageraient pas mon point de vue sur la question. » C’est pourquoi il pense que l’éducation sexuelle doit faire partie d’un cours spécifique, où les objectifs sont préalablement connus, et qui offre un encadrement adéquat aux élèves. Il propose d’investir les ressources en matière d’éducation à la sexualité dans l’embauche d’éducateurs-sexologues qui restent, selon lui, les mieux formés pour aborder cette matière. « Moi, je suis prof. de français. Je n’ai pas les compétences pour faire de l’éducation sexuelle. »