Clitoris, vagin, plaisir…

Dossier : Sexe

Dossier : Sexe

Clitoris, vagin, plaisir…

Quelques notions d’intérêt public

Pinote

Le clitoris

Jusqu’à la sixième semaine in utero, l’embryon possède le même « tronc commun » génital, qui se développe ensuite vers une forme pénis / scrotum / testicules, clitoris / lèvres / ovaires ou une variation de ces deux formes si la personne naît intersexuée. Si le pénis a plusieurs fonctions (sensation, éjaculation et miction), le clitoris n’en a qu’une : le plaisir. Mission relativement facile à accomplir puisque c’est la partie la plus sensible du corps : elle compte 8 000 terminaisons nerveuses. La plupart des personnes qui possèdent un clitoris connaissent l’importance de l’organe. Pourtant, c’est en 1998 seulement qu’une urologue australienne révèle l’anatomie complète du clitoris ! Alors qu’on commençait déjà à traiter la dysfonction érectile du mâle humain, on découvrait à peine l’organe de la sexualité et du plaisir de la femelle. Le clitoris est constitué d’une double arche. Les corps caverneux qui peuvent mesurer jusqu’à 15 cm et l’arche bulbaire qui enserre partiellement le vagin. Le gland, soit la partie visible du clitoris, n’est donc qu’une infime partie d’un système plus complexe, qui entre en érection lorsque sexuellement stimulé. L’anatomie et le plaisir féminins sont des champs de recherche qui restent à explorer. Malheureusement, le financement est difficile à obtenir et il existe des réticences dans les milieux scientifiques, qui considèrent le plaisir et la réponse sexuelle féminine comme des enjeux moins importants que ceux liés à la fonction reproductive.

Masturbation

80 à 90 % des personnes qui ont un clitoris se masturbent sans pénétration vaginale, même lorsqu’elles utilisent un vibrateur de forme allongée. En fait, moins d’un tiers des personnes qui ont un vagin ont des orgasmes sur une base régulière lors d’une pénétration vaginale. Pourtant, l’une des questions les plus couramment posées lors des ateliers d’éducation sexuelle est « Pourquoi est-ce que je n’arrive pas à avoir d’orgasme lors de la pénétration ? » ou « Comment arriver à avoir un orgasme lors de la pénétration ? » En fait, on devrait plutôt se demander pourquoi certaines personnes atteignent l’orgasme lors de la pénétration vaginale, vu qu’elles sont une minorité. La réponse la plus fréquemment avancée est que la stimulation de la partie frontale basse du vagin et les contractions périnéales provoquent un mouvement des bulbes vestibulaires du clitoris. L’orgasme vaginal serait donc en fait… clitoridien !

Concordance

Imaginez un laboratoire. Des cobayes humains, mâles et femelles, sont exposés à des images de paysages, de nourriture, d’animaux qui copulent, de pornographie hétérosexuelle, gaie, lesbienne, etc. Ils et elles doivent indiquer le niveau d’excitation ressenti lorsque exposé·e·s à chacune de ces images. Pendant ce temps, une sonde calcule l’afflux sanguin dans leurs organes génitaux. Résultats : il y a chez les mâles une concordance de 50 % entre la réaction physiologique – l’afflux sanguin dans la verge – et l’excitation sexuelle subjective. Chez les femelles, cette concordance n’est que de 10 %. Ces résultats ouvrent de nombreux champs de recherche et pistes d’interprétation sur le rapport entre la réponse physiologique des corps et le désir et le plaisir sexuels. Ils permettent aussi de participer à la déconstruction de mythes tenaces et parfois très dangereux sur la réponse sexuelle. Il est possible d’être sexuellement excité·e sans avoir de réponse physiologique (pas d’érection, pas de lubrification). Il est possible d’avoir une érection ou une lubrification vaginale sans être excité·e. Il est même possible d’avoir un orgasme ou une éjaculation sans avoir de plaisir. Ce qui peut se passer lors d’une agression sexuelle. Le mythe de la concordance peut avoir des conséquences dramatiques sur les victimes d’agression sexuelle, permettant à l’agresseur·e de se justifier (« tu vois, finalement t’as aimé ça ! ») et pouvant provoquer un sentiment de culpabilité chez la victime. Une réaction du corps à un stimulus sexuel non désiré n’équivaut en aucun cas à une forme de plaisir ou de consentement  [1].


Ces informations sont en grande partie tirées de l’ouvrage Come as You are – The surprising new science that will transform your sex life d’Emily Nagoski paru en mars 2015 chez Simon & Schuster.


[1En savoir plus : R. J. Levin et W. van Berlo, « Sexual arousal and orgasm in subjects who experience forced or non-consensual sexual stimulation – a review », Journal of forensic medicine, avril 2004.

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