Samy Manga
Chocolaté. Le goût amer de la culture du cacao
Samy Manga, Chocolaté. Le goût amer de la culture du cacao, Écosociété, 2023, 136 pages.
L’écrivain, ethnomusicien, artiste et militant écologiste camerounais — aussi co-auteur d’Opinion poétique (L’Harmattan, 2020) avec Caroline Despont — compose avec ce livre exalté une combinaison explicite englobant une écriture poétique forte, le personnage d’un enfant qui sert de porte-voix à la transmission de la mémoire vernaculaire sans jamais dérougir d’une conscientisation fondamentale à la lutte contre l’envahisseur. Lutte oh combien inégale et emblématique d’un capitalisme « indestructible » ; envers les requins du cacao qui asservissent les cultivateurs, devrait-on dire les damnés, de cet or vert nommé cacao. Cette lecture donne à régurgiter ce chocolat bon au goût, mais fabuleusement dégueulasse : les multinationales du cacao constituent de véritables hydres, les écrans de fumée multiples brouillent invariablement la compréhension d’état de fait qui ne change pas d’un iota malgré tous les protocoles et toutes les belles promesses… Pire, dire une chose et faire le contraire passe même avec une facilité déconcertante !!! Manga pose pourtant la voix de l’enfant qui questionne son grand-père sur leur indigence persistante tandis que les blancs repartent inexorablement avec leurs précieuses fèves de cacao. De chocolat engagé et équitable, il n’en existe point — esclavagisme (entre autres des enfants), pesticides délétères, déforestation ravageuse (80 % des forêts de la Côte d’Ivoire ont été rasées en 50 ans !), asservissement et même endettement pour une matière première dont les Africain·es ne verront jamais la couleur des millions et des milliards récoltés périlleusement. En 2012, le prix du cacao payé aux producteurs a baissé de 20 % ! Les chiffres seront toujours trop stériles pour ressentir la plaie abyssale : « Vaste soleil noir des horizons amputés, je suis le cultivateur aguerri du PIB mondial confisqué, nous sommes ce riche continent braqué par cinq cents supplices imparables appartenant à cent fauves capitalistes du même nom et par sa mondialisation pourrie. ».