La bombe : de l’inutilité des bombardements aériens

No 44 - avril / mai 2012

Howard Zinn

La bombe : de l’inutilité des bombardements aériens

Amélie Nguyen

La bombe : de l’inutilité des bombardements aériens Howard Zinn, Montréal, Lux Éditeur, 2011, 96 p.

Un important livre qui participe à la transcription d’une histoire populaire, au-delà du filtre de l’État et des vainqueurs, une réappropriation qui a été l’une des principales luttes menées par Howard Zinn. L’auteur fut en parallèle un fervent défenseur des droits civiques aux États-Unis, parmi les premiers à s’opposer à la Guerre du Vietnam. Ce qu’on sait peut-être moins, c’est que Zinn a aussi été bombardier lors de la Seconde Guerre mondiale et notamment lors du bombardement de Royan. Son essai prend ainsi la forme originale d’un appel à l’action et, parfois, d’un lourd témoignage. L’auteur tente de dévoiler la raison d’État militariste derrière les constructions discursives qui ont servi de justification aux bombardements d’Hiroshima, de Nagasaki et de Royan. Il effectue un retour sur le détail des événements qui ont précédé la décision de bombarder dans ces trois cas, en s’appuyant sur des analyses, des documents historiques et des témoignages de plusieurs acteurs.

Zinn nous démontre que les décideurs savaient que ces bombardements étaient inutiles pour gagner la guerre, qu’ils allaient tuer des milliers de civils et que cela leur importait peu. Il met à nu une implacable logique guerrière où la volonté de satisfaire les troupes et d’étaler sa puissance militaire fait que la mort de civils peut devenir un objectif en soi. Dans plusieurs cas, elle semble en fait effacer l’acteur, son jugement moral et ses valeurs. On assiste ainsi à une déconstruction du principe de l’utilité militaire et à la dénonciation du fanatisme technologique qui a poussé à ces tueries massives et sans distinction, pour tester de nouveaux armements.

Au final, La bombe est un appel convainquant à nous affranchir de la perspective étatiste et propagandiste de la réalité en agissant « en fonction de notre humanité commune et à l’encontre de ses abstractions que sont le devoir et l’obéissance » puisque «  l’horreur des moyens est toujours certaine, tandis que la pertinence des fins ne l’est jamais.  » À l’heure de la montée de l’intervention humanitaire, un petit livre à lire.

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